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Le petit Etat communard

La Commune
La guerre civile
est déclarée

Depuis la fin de l'Ancien Régime, l'Hôtel de Ville est le symbole des
révolutions. Les commissions qui y- siègent dirigent la cité comme une vraie nation, dans le respect des convictions fédéralistes et communales.

L'Hôtel de ville de la Commune

L'Hôtel de ville de la Commune
Le 18 mars au soir, le Comité central de la Garde nationale prend ses quartiers à l'Hôtel de Ville. Puis, c'est là qu'après les élections du 26 mars va s'établir l'assemblée communale. Depuis 1789, l'hôtel de ville de Paris était le symbole des révolutions. Et ce fut donc bien là que, le 28 mars, la Commune fut proclamée devant une foule immense...
Mais les communards, s'ils occupèrent aussi les ministères, ne voulurent pas installer un gouvernement national. La révolution se voulait fédéraliste et communale. Dès lors, l'Hôtel de Ville devint le siège d'un petit État où les élus exerçaient à la fois le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, ne voulant pas séparer les deux. Les séances de la Commune étaient quasi quotidiennes. On refusa de désigner un président permanent car la Commune ne voulait pas de chefs. Des commissions spécialisées, faisant office de ministère collectif, et composées des seuls élus assuraient le pouvoir exécutif. C'était là aussi que l'on recevait les innombrables propositions venues des clubs et des assemblées populaires, ou les manifestations et les délégations (comme celle des boulangers venus réclamer l'interdiclion du travail de nuit). C'est là aussi que furent votés les
grands décrets de la Commune, comme la séparation des Églises et de l'État ou la réquisition des logements vides.
Le petit État communard employait une centaine de personnes. On pouvait y voir chaque jour Verlaine, devenu responsable du service de presse de la Commune. Le cuisinier du temps de l'Empire était resté, et l'on dit que la table de l'Hôtel de Ville était bonne. Mais, partisans d'une « République austère », les élus
fixèrent un maximum aux salaires de la haute fonction publique. La mémoire de la Commune reste présente dans le nouvel Hôtel de Ville construit entre 1874 et 1882. Une plaque, installée en 2015 dans le couloir menant à la salle des délibérations, porte l'inscription « Aux élus de la Commune de Paris qui ont administré la
Ville du 26 mars au 28 mai 1871 ».

Des avancées sociales audacieuses

Les mesures prises par la Commune de Paris permettent d'avoir une idée de sa politique. L'utopie commence à entrer dans le monde réel. Quelles qu'en soient les valeurs, elles restent formelles et symboliques (au vu de la fin tragique de l'aventure), mais elles témoignent d'un regard d'ensemble sur la société. Nombre d'entre elles ne seront pas appliquées avant des décennies dans notre pays. Les préoccupations démocratiques et sociales sont bien présentes, mais les questions économiques sont également abordées, tandis que certaines ont un caractère socialiste, comme la préférence accordée pour les marchés publics aux coopératives de production ou la réquisition des usines et ateliers abandonnés par leurs propriétaires, les anciens propriétaires devant être indemnisés.
Les mesures sociales :
Interdiction du travail de nuit des boulangers.
Fixation de la journée de travail à 10 heures.
Prix minimum du travail à la journée.
Réquisition au profit des sans-abri des logements abandonnés par leurs propriétaires depuis le 18 mars.
Remise au locataire de plusieurs termes de loyer.
Suppression de la vente des objets déposés au Mont-de-Piété et restitution des objets engagés dont la valeur ne dépasse pas 20 francs.
Proclamation de l'égalité du salaireentre les hommes et les femmes.
Augmentation du salaire des institutrices et instituteurs.
Suppression des bureaux de placement privés,et leur remplacement par des organismes communaux, dans chaque mairie.
Mesures démocratiques :
Séparation des Églises et de l'État et suppression du budget des cultes.
Suppression du culte à l'église Sainte-Geneviève qui devient Panthéon.
Abolition de la conscription et suppression des armées permanentes.
Instruction publique, gratuite, obligatoire et laïque.
Multiplication des écoles defilles et des écoles professionelles.
Reconnaissance de l'union libre.
Suppression de la distinction entre enfants naturels et légitimes.

La vie quotidienne pendant la Commune

La vie quotidienne pendant la Commune de 1871
A l'heure où l'armée versaillaise en est à chercher le défaut de la cuirasse, la brèche par laquelle elle s'engouffrera dans Paris, la Commune bavarde. Jamais on n'aura tant péroré que pendant ce printemps de 1871. On ne discute pas seulement à l'Hôtel de Ville, mais dans tout Paris.
L'atmosphère quotidienne, pendant cette première quinzaine de mai, subit des changements subtils. A l'ouest de la Concorde, on peut dire que, pratiquement, les quartiers sont déserts. Les tirs sporadiques de l'artillerie versaillaise y expédient des obus un peu au hasard, qui causent surtout des dégâts matériels.
Les combats proprement dits se déroulent, au sud, de Gentilly à Vanves, au pied des fortifications, puis à l'ouest, dans la boucle de la Seine, sur les territoires des communes de Boulogne, Neuilly, Levallois-Perret.
Ailleurs, Paris vit une vie étrange, fébrile, comme si chacun voulait se convaincre que la vie continue comme avant, que tout va s'arranger. C'est l'atmosphère en tout cas des quartiers du centre, où l'on fait sienne la devise britannique: business as usuel, où l'on s'attache à faire marcher les banques, la Bourse, les compagnies d'assurances. A l'égard des établissements financiers, d'ailleurs, la Commune fait preuve d'une incontestable mansuétude. On se souvient du rapport de Jourde: il faut rassurer le crédit.
Dans les fiefs de la révolution, à Montmartre, à Belleville, à Ménilmontant, on cherche plutôt à s'étourdir. Les barricades du père Gaillard plantent au coin des rues d'étranges décors, amoncellements de pavés et de vieux meubles, de poutres et de chariots avec, de-ci, de-là, un canon plus ou moins bien protégé qui fait l'orgueil du quartier.
Les gamins jouent à la guerre autour des barricades, et les gardes nationaux jouent à veiller aux créneaux. Alors que chaque jour la pression des troupes versaillaises se fait plus forte, sur le glacis des fortifications, alors que, selon les rapports de certains membres de la Commune, les fédérés sont 1 200 pour faire face à 40 000 gouvernementaux, ils sont des dizaines de milliers qui traînent dans Paris, qui abandonnent un instant la barricade pour aller boire un coup au bistrot voisin, tandis que les femmes bavardent en faisant leurs emplettes.
Le garde national est avant tout l'homme de son quartier. Il lui est difficile de « visualiser » les communiqués de Delescluze ou de Dombrowski, d'attacher une réelle importance à des combats dont il n'est pas le témoin, à une stratégie qui le dépasse. Pour lui, le champ de bataille idéal, c'est sa propre rue. Il tente de se persuader qu'il y fera triompher la Révolution, qu'il y piétinera les ennemis de la République.
S'il en doutait, chaque soir, les clubs seraient là pour ie détromper. Ils sont l'expression la plus virulente d'une foule d'organisations qui prolifèrent sous la Commune. On compte 34 chambres syndicales, où les idées politiques et sociales sont souvent très en avance sur leur temps, témoin la motion qu'adresse à la Commune le comité de Vaugirard, après une réunion avec les syndicats des mécaniciens et l'association métallurgique. Elle prône l'association des travailleurs, qui peut seule transformer la condition des salariés en celle d'associés. Elle entend « supprimer l'exploitation de l'homme par l'homme, dernière forme de l'esclavage » et « organiser le travail en associations solidaires à capital collectif et inaliénable ».
Le mot d'ordre est déjà appliqué: on compte, en mai, 43 coopératives de production et 7 sociétés d'alimentation. Mais on compte surtout 36 clubs où, dans la fumée des pipes et des cigarettes, on tonitrue chaque soir l'avènement d'un monde nouveau, le plus souvent dans la violence, le sectarisme et le mépris total des réalités. C'est ainsi que le club de la Révolution, dans le quartier du Panthéon, réclame à l'unanimité, le 5 mai, la mise à prix des têtes de Thiers et de Jules Favre. Afin de passer aux actes, chacun met la main à sa poche. On réunit 11,50 F.
Les séances des clubs se tiennent dans les préaux des écoles, les salles de spectacle des quartiers, mais le plus souvent dans les églises réquisitionnées à cet effet. C'est dans une église que le club révolutionnaire du XVlle arrondissement désigne une délégation chargée de s'assurer que l'archevêque et le curé de la Madeleine sont toujours en prison. Dans le XVllle, on vote la suppression des cultes et l'arrestation des prêtres et, à Montrouge, on ira jusqu'à voter la déchéance de la Commune, parce qu'elle n'est pas assez révolutionnaire.
D'ailleurs, la Commune est à l'écoute des clubs. Ils lui inspirent plus d'une de ses décisions les plus démagogiques, et à quelques jours du drame, on est stupéfait de voir qu'à l'Hôtel de Ville, on délibère chaque jour, avec la même gravité, souvent la même futilité.
On légifère dans le bon sens quotidien. On administre les affaires courantes. Le 8 mai, par exemple, on fixe le prix du pain, qui se trouve maintenu à 50 centimes le kilo.

La Commune anticléricale

La Commune anticléricale en 1871
La Commune est anticléricale, c'est incontestable. Dans le peuple s'est établie depuis longtemps la conviction que les prêtres sont les auxiliaires dévoués de la monarchie comme de l'Empire et, chez les dirigeants, l'irréligion, sinon l'athéisme, vont de pair avec la pensée socialiste. L'Eglise aura à en souffrir. Elle aura ses martyrs, au cours de la sanglante semaine de la fin mai. Pendant ce mois d'avril, elle ne connaît guère que des vexations, des perquisitions, des arrestations. Ici encore, c'est une question de topographie. A Saint-Sulpice et à Saint-Eustache, par exemple, les curés de ces deux paroisses sont efficacement protégés par leurs ouailles. A Montmartre, tous les clercs du quartier sont arrêtés et jetés en prison le 10 avril, tandis que le citoyen Lemoussu, « délégué au commissariat de police », fait apposer l'affiche suivante:
« Attendu que les prêtres sont des bandits et que les repaires où ils ont assassiné moralement les masses en courbant la France sous les griffes des infâmes Bonaparte, Favre et Trochu, sont les églises, le délégué civil des Carrières ordonne que l'église soit fermée et décrète l'arrestation des prêtres et des ignorantins. »
Vingt-six églises sont ainsi fermées dans Paris.
D'autres sont transformées en clubs le soir et demeurent ouvertes au culte dans la journée. Cela donne des situations assez extraordinaires. Après le dernier office du soir, une assistance pittoresque envahit le sanctuaire en fumant la pipe, s'assied à califourchon sur les prie-dieu, casse la croûte sans vergogne. Les présidents de séance s'installent gravement au banc d'oeuvre et les orateurs se succèdent en chaire comme ce citoyen Landeck qui déclare: « Je suis heureux, je suis fier, de parler du haut de cette tribune, témoin de tant de mensonges et de tant de calomnies, pour vous faire entendre quelques paroles de vérité et de patriotisme... »
Dans d'autres églises, comme à Sainte-Elisabeth-duTemple et Saint-Nicolas-des-Champs, un curieux modus vivendi s'installe. On célèbre les offices d'un côté du choeur et les femmes du quartier tiennent la séance de leur club de l'autre. On peut ainsi suivre simultanément, pour le désarroi de quelques paroissiennes, un rosaire en l'honneur de la Vierge Marie et un débat sur la prostitution.
bas
Les projets qui n'ont pas abouti :
-Réorganisation de la justice : gratuite et rendue par des jurys élus.
-Attribution des ateliers abandonnés par les patrons <<déserteurs »aux - -Election des fonctionnaires.
-Un crédit industriel et ouvrier.